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13 juin 2024 4 13 /06 /juin /2024 08:08

Solennité de la Nativité de saint Jean Baptiste

Antienne d’ouverture

Il y eut un homme, envoyé par Dieu ; son nom était Jean. Il était venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, et préparer au Seigneur un peuple bien disposé.

Prière

Seigneur Dieu, tu as suscité le bienheureux Jean le Baptiste afin qu’il prépare pour le Christ Seigneur un peuple disposé à l’accueillir ; accorde à ton Église le don de la joie spirituelle, et guide l’esprit de tous les croyants sur le chemin du salut et de la paix. Par Jésus Christ.

Lecture du livre du prophète Isaïe 49, 1-6

Écoutez-moi, îles lointaines ! Peuples éloignés, soyez attentifs ! J’étais encore dans le sein maternel quand le Seigneur m’a appelé ; j’étais encore dans les entrailles de ma mère quand il a prononcé mon nom. Il a fait de ma bouche une épée tranchante, il m’a protégé par l’ombre de sa main ; il a fait de moi une flèche acérée, il m’a caché dans son carquois. Il m’a dit : « Tu es mon serviteur, Israël, en toi je manifesterai ma splendeur ». Et moi, je disais : « Je me suis fatigué pour rien, c’est pour le néant, c’est en pure perte que j’ai usé mes forces ». Et pourtant, mon droit subsistait auprès du Seigneur, ma récompense, auprès de mon Dieu. Maintenant le Seigneur parle, lui qui m’a façonné dès le sein de ma mère pour que je sois son serviteur, que je lui ramène Jacob, que je lui rassemble Israël. Oui, j’ai de la valeur aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force. Et il dit : « C’est trop peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus de Jacob, ramener les rescapés d’Israël : je fais de toi la lumière des nations, pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre ». — Parole du Seigneur.

Psaume 138

R/. Je te rends grâce, ô mon Dieu, pour tant de merveilles.

  • Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m’assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées, tous mes chemins te sont familiers.
  • C’est toi qui as créé mes reins, qui m’as tissé dans le sein de ma mère. Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis.
  • Étonnantes sont tes œuvres, toute mon âme le sait. Mes os n’étaient pas cachés pour toi quand j’étais façonné dans le secret.

Lecture du livre des Actes des Apôtres 13, 22-26

En ces jours-là, dans la synagogue d’Antioche de Pisidie, Paul disait aux Juifs : « Dieu a, pour nos pères, suscité David comme roi, et il lui a rendu ce témoignage : J’ai trouvé David, fils de Jessé ; c’est un homme selon mon cœur qui réalisera toutes mes volontés. De la descendance de David, Dieu, selon la promesse, a fait sortir un sauveur pour Israël : c’est Jésus, dont Jean le Baptiste a préparé l’avènement en proclamant avant lui un baptême de conversion pour tout le peuple d’Israël. Au moment d’achever sa course, Jean disait : “Ce que vous pensez que je suis, je ne le suis pas. Mais le voici qui vient après moi, et je ne suis pas digne de retirer les sandales de ses pieds.” Vous, frères, les fils de la lignée d’Abraham et ceux parmi vous qui craignent Dieu, c’est à nous que la parole du salut a été envoyée ». — Parole du Seigneur.

Alléluia. Alléluia. Toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut : tu marcheras devant, en présence du Seigneur, et tu prépareras ses chemins. Alléluia.

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 1, 57-66. 80

Quand fut accompli le temps où Élisabeth devait enfanter, elle mit au monde un fils. Ses voisins et sa famille apprirent que le Seigneur lui avait montré la grandeur de sa miséricorde, et ils se réjouissaient avec elle. Le huitième jour, ils vinrent pour la circoncision de l’enfant. Ils voulaient l’appeler Zacharie, du nom de son père. Mais sa mère prit la parole et déclara : « Non, il s’appellera Jean ». On lui dit : « Personne dans ta famille ne porte ce nom-là ! » On demandait par signes au père comment il voulait l’appeler. Il se fit donner une tablette sur laquelle il écrivit : « Jean est son nom ». Et tout le monde en fut étonné. À l’instant même, sa bouche s’ouvrit, sa langue se délia : il parlait et il bénissait Dieu. La crainte saisit alors tous les gens du voisinage et, dans toute la région montagneuse de Judée, on racontait tous ces événements. Tous ceux qui les apprenaient les conservaient dans leur cœur et disaient : « Que sera donc cet enfant ? » En effet, la main du Seigneur était avec lui. L’enfant grandissait et son esprit se fortifiait. Il alla vivre au désert jusqu’au jour où il se fit connaître à Israël. — Acclamons la Parole de Dieu.

Prière Universelle

R/. Fais venir ton Règne au-milieu de nous !

Son nom est Jean, c'est-à-dire « Dieu fait grâce »

  • Que la grâce de Dieu ne manque jamais à son Église, pour qu’elle annonce avec joie la Présence de Jésus au-milieu des hommes. R/.
  • Que la grâce de Dieu aide les dirigeants à combler les ravins, à aplanir les routes, à rendre droits les sentiers, pour un monde plus juste et fraternel. R/.
  • Que la grâce de Dieu soutienne les malades, les pauvres, les démunis, pour que nous ne les laissions pas seuls au bord du chemin. R/.
  • Que la grâce de Dieu nous rende forts contre le mal et généreux à son service pour que grandisse dans le monde, le Corps du Christ. R/.

Source : http://carmelsaint-maur.blogspot.com

Prière sur les offrandes

Accueille, Seigneur, ces offrandes ; elles sont déposées sur ton autel pour célébrer comme il convient la nativité de saint Jean, car il prophétisa que le Sauveur du monde viendrait, et montra qu’il était déjà parmi nous. Lui qui vit et règne pour les siècles des siècles.

Préface

Vraiment, il est juste et bon, pour ta gloire et notre salut, de t’offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu, Seigneur, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant, par le Christ, notre Seigneur. Nous chantons les merveilles que tu as accomplies pour Jean, le Précurseur de ton Fils ; parmi ceux qui sont nés d’une femme, tu l’as consacré, lui faisant l’honneur d’une mission sans égale. Avant même de naître, il tressaillit d’allégresse à l’approche du Sauveur ; en venant au monde il apportait une grande joie ; il fut, de tous les prophètes, celui qui désigna l’Agneau de la rédemption ; dans les eaux qui devaient en être sanctifiées il baptisa l’auteur du baptême ; et il rendit au Christ le témoignage suprême, celui de son propre sang. C’est pourquoi, avec les puissances des cieux, nous pouvons te bénir sur la terre et t’adorer sans fin en proclamant : Saint !…

Antienne de communion

Grâce à la tendresse, à l’amour de notre Dieu, l’astre d’en haut est venu nous visiter.

Prière après la communion

Au festin des noces de l’Agneau, tu as refait nos forces, Seigneur, et nous te prions : donne à ton Église qui trouve sa joie dans la naissance du bienheureux Jean le Baptiste de reconnaître en Jésus dont il annonçait la venue l’auteur de la nouvelle naissance des croyants. Lui qui vit et règne.

Lectures de la fête de saint Jean Baptiste en DOCX et PDF

Homélie

En apprenant les signes et prodiges qui venaient d'entourer la naissance de Jean, (ce nom veut dire « Dieu fait grâce ») les habitants de la montagne de Judée se demandaient ce que sera donc cet enfant ?

Nous, qui à quelques 2000 ans de distance aimons fêter à notre manière cette naissance du Précurseur de Jésus, nous n'avons pas besoin évidemment de nous poser cette question. Il nous suffit de lire attentivement les récits évangéliques pour découvrir la destinée étonnante et la figure vraiment fascinante de cet homme qui fut le dernier et le plus grand des prophètes et dont Jésus Lui-même a dit : « Je vous le déclare, parmi les enfants des femmes, il n'en est point paru de plus grand que Jean, le Baptiste ».

Pourquoi Jésus le juge-t-il si grand ?  Ne serait-ce pas parce qu'il voit en Lui un homme vraiment exemplaire ?

Oui, un homme, au sans premier du terme, un homme authentique, tel que Dieu le veut, c'est-à-dire une conscience, une droiture, une fidélité inflexible au devoir.

Rappelons brièvement les traits les plus marquants de cette physionomie spirituelle hors du commun, tels qu'ils ont été mis en lumière par les Évangélistes. Jean-Baptiste c'est tout d'abord un homme qui a littéralement la passion de la Vérité et qui jamais ne consentira par opportunisme à l'accommoder, à la diminuer ou à la déformer. Pour lui il n'y a pas 2 vérités, il n'y a pas 2 morales. Lorsqu'il doit s'adresser à la grande foule, je veux dire à ces gens qui ne sont ni des héros, ni des criminels, mais des médiocres et des faibles, il ne dissimule pas les commandements essentiels, il ne force pas, non plus leurs exigences.

Aux collecteurs d’impôts, il dit tout simplement « ne chargez pas indûment les contribuables » et aux soldats « ne soyez ni violents, ni pillards ». Mais quand il a devant lui les hypocrites orgueilleux qui, se flattent d'êtres sauvés par leurs privilèges religieux et leurs situations, il les démasque avec vigueur. « Race de vipères », leur dit-il, « arbres pourris, menacés par la hache » et pas un instant il ne s'inquiète des conséquences de ses invectives contre les puissants de ce monde. Ce qui lui importe, par dessus tout, c’est d'être le porte-parole, le haut-parleur de Dieu.

Jean-Baptiste c'est aussi l'homme qui ne se laisse impressionner ni par la réussite, ni par l’épreuve : ce n'est ni au succès, ni à l'échec, qu'il demande des conseils. Ici encore, nous devons nous rappeler sa carrière extraordinairement contrastée. Il a été l'homme des grands triomphes, celui qui remue les foules, qui jette tout un peuple sur les routes et qui le voit accourir à lui, celui qui déchaîne les enthousiasmes et dont on dit : « c'est un grand prophète, c'est peut-être le Messie, le Libérateur tant espéré ».

Or, pas un seul instant cette popularité ne lui fait tourner la tête. Rien n'est capable de le faire dévier : coûte que coûte il reste fidèle à sa mission. C'est une âme maîtresse d’elle-même qui ne se laisse pas manœuvrer. Mais voici que le moment arrive où le Précurseur sent fléchir cette énorme popularité : il devient 1'homme dont on se détache et dont la gloire s'éclipse au profit d'un autre : celle de Jésus de Nazareth. Celui qu'il a désigné lui-même comme l'Agneau de Dieu venu pour sauver les hommes.

Pas d'amertume cependant dans le Cœur de Jean-Baptiste, pas la moindre trace de jalousie : il considère que ce renversement est dans l'ordre naturel des choses. Sa profonde humilité l'incitera à s'effacer pour laisser passer Jésus devant. « Il faut qu'il croisse, dit-il, et que moi je diminue ».

Il y a plus douloureux encore. Sa destinée brusquement tourne au tragique : le voilà en prison et une prison sans espoir. Désormais sa carrière est brisée. Et cependant, Hérode qui le retient captif, n’échappe pas totalement à son influence : peut-être pourrait-il, en étant plus diplomate, plus conciliant, obtenir sa libération ?

Mais Hérode est un pécheur vraiment scandaleux et pour Jean il n’est pas question de transiger avec la loi morale, qui est la volonté de Dieu. C’est un homme qui sait dire non quand c’est non. Et c’est avec véhémence qu’il reproche à Hérode sa mauvaise conduite : « Il ne t’est pas permis de garder la femme de ton frère ». Certes, il sait très bien que ce non intransigeant, c’est l’équivalent pour lui d’un arrêt de mort. Mais d’avance, il en a accepté toutes les conséquences. Il ne tardera pas, d’ailleurs, à être décapité dans sa prison. Mort obscure, stupide en apparence, mais au regard de Dieu, mort glorieuse, suprême témoignage d’un serviteur fidèle dont la conscience n’a jamais capitulé. 

Telle est, chers frères et sœurs, la personnalité vigoureuse que l’Eglise propose aujourd’hui à notre admiration et plus encore à notre imitation. La grandeur de Jean-Baptiste c’est d’avoir été, c’est d’être toujours resté l’homme de sa vocation, celui qui a accompli uniquement et entièrement ce que Dieu attendait de lui.

Cette grandeur-là porte un nom : c’est la Sainteté. Laissons-nous donc instruire par cette vie exemplaire, si droite, si lumineuse. Mettons-nous à sa rude, mais excellente école. Nous en avons particulièrement besoin en ces temps que nous vivons, où trop souvent hélas, prédominent une incroyable confusion des idées, un déplorable esprit de compromission et de facilité et surtout ce déclin du courage que Soljenitsyne ne craint pas de stigmatiser dans ses discours. Et si à certaines heures le devoir nous paraît trop exigeant, trop lourd, trop périlleux, s’il soulève nos répugnances ou nos peurs, souvenons-nous que ce héros, ce grand saint que fut saint Jean-Baptiste, fut d’abord un homme comme nous, non pas un bloc de marbre, mais un cœur, une sensibilité délicate, une nature capable de souffrir et qu’il a éprouvé, lui aussi, nos répulsions et nos agonies. Seulement, tous ces obstacles, il a trouvé la force de les surmonter dans cet amour de Dieu si ardent, si généreux, qu’il ne cessait de puiser aux sources vives de la prière et de la pénitence.

Ces mêmes moyens : la Prière et la Pénitence qui permettent de se dépasser, qui permettent de progresser chaque jour dans la Foi, l’Espérance et l’Amour, Jésus nous les a recommandée instamment. Ils sont absolument indispensables. Celui qui prétend pouvoir s’en passer ne mérite plus le nom de chrétien. Et nous savons que nous pouvons compter en outre sur la grâce surabondante des sacrements (confession et eucharistie) et sur l’aide si efficace de Marie, la maman de nos âmes qui en étroite coopération avec le Saint-Esprit forme en nous le Christ. Evoquant un jour le ministère de son Précurseur, Jésus disait : « Jean-Baptiste fut un flambeau qui brûle et qui luit ».

Toutes proportions gardées, n’est-ce pas la mission qui est assignée à chacun de nous ? Alors, que nous soyons grand flambeau ou petite flamme, peu importe ! A la place et dans les conditions de vie qui sont les nôtres, tous, nous sommes appelés à éclairer le monde par notre foi et à le réchauffer par notre amour. Surtout « n’ayons pas peur », car la main du Seigneur est aussi avec nous. Par notre fidélité à l’Evangile et la vigueur de notre témoignage, soyons les messagers infatigables de Jésus, soyons les précurseurs de l’Unique Sauveur des hommes. « Ouvrons la route au Seigneur qui vient ».

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17 juin 2018 7 17 /06 /juin /2018 07:00

Saint Jean-Baptiste, vous le connaissez bien, et pas seulement le récit de sa naissance que nous venons d'entendre, mais aussi sa prédication fougueuse sur les bords du Jourdain et son humilité : il a conduit ses disciples à Jésus, dont il disait qu'il n'était pas digne de dénouer la courroie de ses chaussures.

Est-ce que je peux me permettre, moi, de vous dire pourquoi j'aime Jean-Baptiste, ce que j'aime le mieux de la vie de Jean-Baptiste, c'est une phrase qu'il a prononcée, quelques mots - pour lui ce n'étaient pas des mots seulement - c'était une vraie question qui lui sortait du cœur. Cette question, il l'a posée à Jésus, pas directement d'ailleurs, car il était en prison. Il a envoyé ses amis la poser à Jésus de sa part : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »

Vous me direz, pourquoi attacher tant d'importance à cette phrase ?

Tout simplement parce que cette question est la question de tout le monde. Pas la vôtre ?... Jésus est-il l'envoyé de Dieu, le Fils de Dieu ? Tout ce qu'on dit de lui, est-ce que c'est vrai ? Tout ce que les chrétiens sont invités à croire à son sujet, est-ce que c'est vrai, ou bien est-ce une invention de ses disciples, une formidable erreur, un formidable mirage entretenu depuis des siècles ?

Avec Jean-Baptiste, aujourd'hui, essayons d'avancer ensemble. Pourquoi Jean-Baptiste a-t-il posé cette question ? Pour deux raisons, me semble-t-il. La première : en voyant Jésus, il était étonné... au point de douter.  La deuxième : en voyant ce qui lui arrivait à lui, Jean-Baptiste, il était scandalisé au point de douter.

Étonné au point de douter. En effet, marqué par son tempérament, la culture religieuse de son temps, Jean avait des vues très strictes sur le Messie. Ce devait être un justicier départageant sur le champ les bons et les méchants. Tout le monde attendait, à l'arrivée du Messie, une intervention foudroyante de Dieu, alors que le charpentier de Nazareth racontait que Dieu était comme un berger qui va rechercher sa brebis perdue ou comme un père qui attend le retour de son fils qui a pourtant quitté la maison avec l'argent de la famille. Comment ne pas s'étonner au point de douter ?

Mes amis, trouverais-je les mots pour vous dire avec assez de conviction que la foi en Jésus Christ ne peut que passer par l'étonnement. Avoir la foi, c'est être étonné. Les chrétiens sont les étonnés de l'amour. Tant que je ne serai pas étonné, je ne serai pas croyant. Car le visage de Dieu révélé par Jésus est étonnant. Car le chemin emprunté par Jésus est étonnant. L'Évangile est étonnant. L'Évangile est rempli de l'histoire merveilleuse de cet amour fou de Dieu qui nous étonne. Tellement que nous disons : « C'est inimaginable ». C'est vrai, jamais nous n'aurions pu l'imaginer. « C'est incroyable. » Et pourtant c'est cela qui s'appelle croire. C'était la première raison de douter.

Voici la deuxième : Jean-Baptiste, en voyant ce qui lui arrivait était scandalisé, au point de douter. Il est scandalisé et on le comprend. II est en prison et vous savez pourquoi, en raison de sa fidélité à sa mission de prophète. Il n'avait manqué ni de courage ni de conviction quand il avait dénoncé la mauvaise conduite d'Hérode. Et voilà qu'on l'avait mis en prison dans la forteresse de Machéronte sur les hauteurs de la Mer Morte. Il pouvait tout craindre et la suite l'a prouvé. Sa tête a été exigée à la fin d'un repas par Hérode pour faire plaisir à sa maîtresse. Enfermé dans son cachot, Jean-Baptiste était enfermé dans sa question : « Jésus était-il le Messie ou fallait-il en attendre un autre ? » Si Jésus est vraiment l'envoyé de Dieu, est-ce que le sort fait à ses amis, à ses défenseurs, peut être aussi rude ? Qui est Dieu s'il n'intervient pas pour protéger ses amis ? Pas difficile de comprendre cette question, c'est la nôtre. Où est Dieu quand je suis accablé de souffrance ? Ne peut-il pas épargner la vie des justes, des innocents ? Que fait-il ? Ce que je vais tenter de répondre en quelques phrases sera forcément dérisoire, tellement la question est énorme. Il ne s’agit de rien moins que du redoutable problème du mal qui hante l'humanité depuis que le monde est monde. Disons-le tout net, le problème du mal, du malheur innocent, est un mystère ténébreux devant lequel on ne peut que balbutier. N'en déplaise à certains, les chrétiens n'ont pas réponse à tout. Et pourtant, on ne peut pas se taire.

Aujourd'hui, je me contenterai de dire une seule chose que Jean-Baptiste a bien dû deviner. Que fait Dieu ?... Dieu n'intervient pas ordinairement pour changer le cours des événements. Je dis ordinairement. Car on ne peut pas mettre le miracle hors la loi. Mais le miracle n'est pas la loi. Dieu n'intervient pas à la place des hommes. C'est le prix qu'il attache à la liberté de l'homme. Il faut avoir le courage de le dire, même si bien des formules de prière nous ont habitués à ce genre de tranquillisant. Dieu n'est pas intervenu pour empêcher la prison et la mort de Jean-Baptiste.

Dieu n'est pas intervenu pour empêcher la mort de Jésus. Il n'est pas intervenu pour empêcher les hommes de le condamner et de l'exécuter. C'est donc que Dieu n'intervient pas comme cela.
Il a fait mieux : en ressuscitant Jésus, il nous donne l'assurance qu'une vie menée dans l'amour, qu'une mort vécue dans l'amour sont des chemins de vie. Il nous donne de croire que c'est l'amour qui gagne et qui gagnera. Dieu n'intervient pas dans les événements, il intervient dans le cœur des hommes et des femmes qui vivent ces événements, pour y mettre cet amour qui peut tout changer.

Mes amis, que le Seigneur mette dans vos cœurs assez d'amour, assez de force pour vivre ce que vous avez à vivre. C'est dans les cœurs des hommes que Dieu intervient, C'est là que s'accomplissent les merveilles de Dieu.

Les sept moines de Tibhirine vous connaissez. Enfermés dans la grotte ou le cachot, avant leur exécution, ils ont dû se poser la même question que Jean-Baptiste : « Où est Dieu ? » Dieu n'est pas intervenu pour empêcher les extrémistes de les massacrer. Mais ce que nous croyons, c'est que Dieu est sûrement intervenu pour ciseler en eux des cœurs pareils, pour faire de ces sept hommes ordinaires des témoins extraordinaires d'un amour plus fort que la haine entre les peuples, les races, les religions, un amour plus fort que la mort. Comme pour Jean-Baptiste, Dieu a fait d'eux des « lumières pour les nations ». Leur sacrifice a fait le tour du monde.

Au terme de cette méditation autour de Jean-Baptiste, aurons-nous retenu à son école que la foi chrétienne, notre foi, peut être étonnée et même scandalisée. Mais elle se vit au-delà de cet étonnement, au-delà de ce scandale.

 

Père Jean Corbineau

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