La naissance de Moïse
Quatre cents années passèrent, et les enfants d’Israël devinrent une immense nation. Après la mort de Joseph, les rois d’Égypte craignirent de voir ces étrangers prendre trop d’importance et ils les traitèrent avec dureté, les condamnant à travailler comme des esclaves. En dépit de ces cruels traitements, ce peuple continua à prospérer et à s’accroître, au point que Pharaon eut recours à des mesures plus radicales. Il intima à ses soldats l’ordre de noyer dans le Nil tout garçon nouveau-né de parents israélites. Et l’ordre fut exécuté. Les pauvres mères eurent beau pleurer et gémir, leurs bébés furent livrés sans pitié à une mort violente. Pourtant l’une d’elles réussit à dissimuler son nouveau-né. Toutefois, quand l’enfant eut trois semaines, il fut impossible de le garder au secret. Alors sa mère eut une idée : elle prit un petit panier qu’elle enduisit de goudron et de poix pour le rendre étanche. Puis elle enveloppa le nouveau-né de couvertures chaudes et le mit dans le panier. Elle eut soin de le poser sur l’eau pour qu’il flotte au milieu des longs roseaux tandis que sa fille Myriam, cachée tout près, suivait des yeux la frêle embarcation. Peu de temps après, la fille de Pharaon vint prendre un bain dans le fleuve. En longeant la rive, elle vit le panier et ordonna à une esclave de l’attraper.
« C’est un bébé, s’écria-t-elle en regardant à l’intérieur. Ce doit être un nouveau-né israélite ». L’enfant se mit à pleurer et la princesse le prit en pitié. « Pauvre petite chose, dit-elle, il cherche sa mère. Je vais m’en occuper comme s’il s’agissait de mon propre fils ». Myriam l’entendit et se précipita vers la princesse. « Voulez-vous que je vous trouve une femme d’Israël pour qu’elle prenne soin du bébé à votre place ? » lui demanda-t-elle. « Oui, va », dit la fille de Pharaon. Et Myriam s’en alla trouver la mère du bébé. « Prenez soin de l’enfant, lui dit la princesse, et je vous paierai ». La vraie mère exultait : elle pouvait garder son enfant sans avoir à craindre quoi que ce soit. Lorsqu’il fut plus grand, elle amena le petit garçon au palais et la fille de Pharaon l’éleva comme son fils. Elle l’appela Moïse.
Dieu appelle Moïse
Élevé dans le palais du roi, Moïse y était traité du mieux possible. On lui apprit à lire et à écrire, il portait les plus beaux habits et se promenait dans un char princier. Mais, bien qu’ayant toutes les apparences d’un Égyptien, il n’oubliait pas qu’il était un Hébreu, un enfant d’Israël. Moïse vit à quel point son peuple était maltraité. Il en fut peiné et voulut lui venir en aide. Un jour, il vit un Égyptien battre cruellement un esclave israélite. Il ne put le supporter et, dans sa colère, il tua l’Égyptien. La nouvelle de ce meurtre parvint aussitôt jusqu’aux oreilles de Pharaon, qui condamna Moïse à la peine de mort. Aussi le jeune homme prit-il la fuite et quitta l’Égypte. Après avoir traversé des déserts, il finit par s’arrêter à un endroit appelé Madian. Là, il s’engagea comme berger chez Jéthro, un homme dont il épousa l’une des filles. Celle-ci lui donna un fils. Un jour que Moïse gardait seul les moutons près du Sinaï, il vit des flammes au milieu d’un buisson. En cherchant à éteindre le feu, il s’aperçut que malgré les apparences le buisson ne brûlait pas. « C’est étrange », pensa Moïse, et il observa très attentivement les flammes.
Alors il entendit une voix : « Moïse, Moïse, ne t’approche pas. Enlève tes souliers : ici, le sol est sacré ». Moïse sut que c’était la voix de Dieu. Il l’écouta avec respect. « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, dit la voix. J’ai vu les souffrances de mon peuple en Égypte et j’ai entendu ses prières. Il est temps de le libérer des Égyptiens et de lui restituer la terre promise, celle de Canaan. Je veux que tu ailles en Égypte et que tu arraches mon peuple à l’esclavage ». En entendant ces paroles, Moïse fut effrayé à l’idée de retourner en Égypte. Mais Dieu le rassura : il n’avait rien à craindre, car tous ses ennemis étaient morts. « Je serai avec toi, dit-il, et quand tu auras fait sortir d’Égypte tout mon peuple, tu viendras me trouver et m’adorer sur cette montagne ». « Et si les enfants d’Israël ne me croient pas et ne m’écoutent pas ? » demanda Moïse. Dieu lui répondit que lui-même accomplirait de nombreux miracles pour montrer à son peuple et aux Égyptiens qu’il était le vrai, l’unique Dieu. Et, comme Moïse hésitait, Dieu lui dit de se faire aider par son frère Aaron : « Prends aussi le bâton que tu as dans la main, dit Dieu, et avec tu réaliseras de grands miracles ». Et Moïse obéit à Dieu. Il prit sa femme, ses enfants, son bâton et s’en retourna en Égypte.
Moïse et Pharaon
Pendant ce temps, en Égypte, Dieu parla aussi à Aaron, et celui-ci partit à la rencontre de Moïse. Quand les deux frères se retrouvèrent, Moïse expliqua à Aaron ce que Dieu lui avait demandé de faire. Alors, les deux hommes voyagèrent ensemble et allèrent trouver les anciens d’Israël. Ensemble ils accomplirent des miracles pour convaincre leurs auditeurs que Moïse était bien envoyé par Dieu pour les aider. Il était temps désormais d’affronter Pharaon, le roi d’Égypte. Moïse et son frère lui demandèrent une audience. Quand, après une longue attente, ils furent enfin devant lui, ils lui tinrent ce discours : « Le Seigneur, Dieu d’Israël, dit : laisse partir mon peuple, afin qu’il puisse me vénérer dans le désert ».
« Je ne connais pas votre Seigneur, et je ne laisserai certainement pas partir son peuple », répliqua aussitôt Pharaon. « Mais, insistèrent les deux hommes, si nous désobéissons au Dieu d’Israël, il risque de frapper l’Égypte de graves fléaux ». Ces paroles mirent Pharaon hors de lui, et il enjoignit à Moïse et à Aaron de retourner au travail. Il mena alors la vie dure aux esclaves hébreux, qui reçurent encore plus de coups. Aussi les anciens d’Israël se plaignirent-ils auprès de Moïse et d’Aaron : « Vous n’avez fait qu’empirer les choses », dirent-ils. Moïse savait qu’ils avaient raison, et il fut désemparé. Heureusement, Dieu se fit à nouveau entendre : « N’aie pas peur, dit-il à Moïse, Vous allez bientôt voir ce qui va arriver aux Égyptiens. Je ferai regretter au roi sa décision. Il en viendra à supplier les enfants d’Israël de partir ! » Et il renouvela sa promesse de libérer son peuple. Alors Moïse et son frère demandèrent à Pharaon une nouvelle audience. Ils l’avertirent que, s’il ne laissait pas le peuple d’Israël quitter le pays, Dieu provoquerait en Égypte de terribles désastres. Pharaon éclata de rire : « Les enfants d’Israël, dit-il, ne partiront pas. Je ne crois pas en votre Dieu ». Et il renvoya les deux frères. Dieu tint alors ses promesses, et bientôt de terribles maux vinrent frapper les Égyptiens.
Les neuf plaies d’Égypte
D’abord, Dieu dit à Moïse de toucher de son bâton la surface du Nil. Dès qu'il l’eut fait, l’eau du fleuve rougit et prit la couleur du sang, tous les poissons moururent et il n’y eut plus une goutte d’eau à boire en Égypte. Ensuite Dieu lança une invasion de crapauds.
Ils étaient grands et gros. Des milliers de ces batraciens surgirent des eaux empuanties du fleuve et envahirent palais et maisons, bondissant partout dans les cuisines, sautant sur la nourriture et se glissant dans les lits des Égyptiens. Pharaon fit venir Moïse : « Je laisserai partir ton peuple si tu me débarrasses de cette plaie ! » dit-il. Moïse pria Dieu, et les crapauds moururent. Mais Pharaon changea d'avis. Alors d'autres
fléaux s’abattirent sur l’Égypte avec une nuée de moustiques venimeux puis l’irruption d’énormes mouches grouillant partout dans les maisons. Cette fois encore, Pharaon commença par autoriser le départ des enfants d’Israël pour changer d’avis aussitôt.
Après quoi Dieu tua les moutons, les chèvres, les chameaux, et couvrit la peau des Égyptiens d’énormes abcès purulents. Pharaon ne cédait toujours pas. Alors, Dieu amena sur l’Égypte une terrible tempête.
On vit des éclairs étinceler jusqu’à terre, il y eut un tonnerre assourdissant et d’énormes grêlons qui écrasèrent tous ceux qui se trouvaient dessous. Mais Pharaon restait inflexible.
Dieu forma alors de denses nuages de sauterelles voraces qui dévorèrent les récoltes. Il n’y eut plus rien de vert, pas un arbre, pas une plante sous le soleil d’Égypte. Face à l’obstination de Pharaon, Dieu finit par plonger le pays dans les ténèbres pendant trois jours. Tandis que ces fléaux se succédaient, la région où se trouvaient les Hébreux, Goshen, ne fut guère touchée. Dieu montrait ainsi jusqu’où allait sa
puissance. Pourtant, en dépit de ce qui s’était passé, Pharaon continuait à refuser de laisser partir les enfants d’Israël. « Je ne veux plus vous voir, hurla-t-il à l’adresse de Moïse. Si je vous revois, vous mourrez ». Et Moïse s’éloigna, attendant de voir comment Dieu allait réagir cette fois.
La première Pâque
L’ultime fléau réservé par Dieu à l'Égypte fut plus terrible encore que les précédents. Dieu dit à Moïse et à Aaron : « Quand je vous le dirai, chaque famille d’Israël devra, pendant la nuit, tuer un agneau, prendre son sang et en verser un peu sur le linteau de la porte de la maison, puis, tout en se tenant prête à partir, manger l’agneau rôti avec des herbes amères ».
Cette nuit-là, poursuivit Dieu, l’ange de la mort passera dans toute l’Égypte et frappera chaque premier-né mâle, homme et animal. Mais, lorsqu’il verra le sang sur la porte, il saura que les habitants me vénèrent. L’ange de la mort passera alors au-dessus d’eux sans leur faire aucun mal ». Puis Dieu recommanda à Moïse de faire célébrer par la suite ce jour mémorable : « Lorsque vos enfants vous demanderont ce que cette célébration signifie, dit Dieu, vous leur direz : c'est le jour du sacrifice de la Pâque (le mot signifie "passage"), consacré à ce Dieu qui a épargné les foyers des enfants d’Israël alors qu’il frappait ceux de l’Égypte ». A minuit, le jour désigné par Dieu, le premier fils de chaque famille égyptienne trouva la mort. Du palais du roi au plus pauvre taudis, pas un foyer égyptien ne fut épargné. Jamais on n’avait entendu tant de pleurs et de gémissements dans le pays. Cette nuit-là, Pharaon fit venir Moïse et Aaron : « Partez, hurla-t-il, quittez mon pays, vous et vos enfants d’Israël. Dehors ! Adorez votre Seigneur autant qu’il vous plaira. Et prenez avec vous vos troupeaux et vos bêtes de somme ». Les Égyptiens avaient désormais si peur d’être affligés d’un nouveau malheur qu’ils pressèrent les Hébreux de s’en aller le plus vite possible. Ils leur donnèrent même des bijoux d’or et d’argent, ainsi que de beaux habits. Il n’était plus temps d’attendre que la pâte à pain soit levée : les femmes d’Israël prirent donc celle qu’elles avaient préparée, l’enveloppèrent dans un linge et l’emportèrent avec le reste de leurs biens en s'enfuyant. Cette nuit-là, des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants quittèrent l’Égypte avec leurs troupeaux et leurs bêtes de somme. Leur long esclavage avait pris fin. Ils étaient libres.
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