Année B
Lecture du livre des Actes des Apôtres 4, 32-35
La fraternité des premiers chrétiens se concrétisait dans le partage, pour que nul d’entre eux ne soit dans la misère.
La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme ; et personne ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais ils avaient tout en commun. C’est avec une grande puissance que les Apôtres rendaient témoignage de la résurrection du Seigneur Jésus, et une grâce abondante reposait sur eux tous. Aucun d’entre eux n’était dans l’indigence, car tous ceux qui étaient propriétaires de domaines ou de maisons les vendaient, et ils apportaient le montant de la vente pour le déposer aux pieds des Apôtres ; puis on le distribuait en fonction des besoins de chacun. - Parole du Seigneur.
Commentaire : Luc nous a rapporté comment quelques chrétiens étaient venus déposer aux pieds des apôtres l’argent provenant de la vente de leurs biens. Cette mise en commun des ressources n’était pas une obligation. Luc généralise donc quand il écrit que tous vendaient leurs champs ou leurs maisons. On a parlé à ce propos d’une tendance de Luc à idéaliser la vie de la primitive Église. Mais il s’efforce seulement de souligner les lignes de force qui traversaient la communauté, notamment la conscience d’une solidarité profonde entre croyants. Avoir « un seul cœur et une seule âme » n’était pas de leur part une unanimité factice, mais c’était faire qu’ « aucun d’entre eux n’était dans la misère ».
« Aucune d’entre eux n’était dans la misère ». Dans notre communauté chrétienne personne n’est-il dans la misère, matérielle mais aussi spirituelle, sans qu’il soit secouru par ses frères ?
Psaume 117
R/ Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour ! ou : Alléluia !
- Oui, que le dise Israël : Éternel est son amour ! Que le dise la maison d’Aaron : Éternel est son amour ! Qu’ils le disent, ceux qui craignent le Seigneur : Éternel est son amour ! R/
- Le bras du Seigneur se lève, le bras du Seigneur est fort ! Non, je ne mourrai pas, je vivrai pour annoncer les actions du Seigneur. Il m’a frappé, le Seigneur, il m’a frappé, mais sans me livrer à la mort. R/
- La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle :c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux. Voici le jour que fit le Seigneur, qu’il soit pour nous jour de fête et de joie ! R/
Lecture de la première lettre de saint Jean 5, 1-6
Pour saint Jean, aimer Dieu ne relève pas des sentiments, mais d’une pratique de vie : garder ses commandements.
Bien-aimés, celui qui croit que Jésus est le Christ, celui-là est né de Dieu ; celui qui aime le Père qui a engendré aime aussi le Fils qui est né de lui. Voici comment nous reconnaissons que nous aimons les enfants de Dieu : lorsque nous aimons Dieu et que nous accomplissons ses commandements. Car tel est l’amour de Dieu : garder ses commandements ; et ses commandements ne sont pas un fardeau, puisque tout être qui est né de Dieu est vainqueur du monde. Or la victoire remportée sur le monde, c’est notre foi. Qui donc est vainqueur du monde ? N’est-ce pas celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ?
C’est lui, Jésus Christ, qui est venu par l’eau et par le sang : non pas seulement avec l’eau, mais avec l’eau et avec le sang. Et celui qui rend témoignage, c’est l’Esprit, car l’Esprit est la vérité. - Parole du Seigneur.
Commentaire : La foi chrétienne est une adhésion profonde à la personne de Jésus Christ et non seulement à un message impersonnel, fut-il celui de l’amour fraternel. Elle est de croire que Jésus de Nazareth, un homme de chair et en os qui a partagé notre histoire – que Jean résume ici dans le baptême d’eau reçu au Jourdain et dans le sang de la croix – est le Messie, c’est-à-dire celui en qui s’accomplissent les promesses faites par Dieu à l’humanité, et qu’il est le Fils de Dieu, c’est-à-dire une personne divine qui nous introduit dans une relation filiale avec Dieu. Une telle foi nous transforme progressivement en fils de Dieu, grâce à elle nous sommes vraiment nés de Dieu. Seule une telle foi nous rend vainqueurs du monde, c’est-à-dire des doutes et des contestations qui peuvent s’élever contre elle, mais aussi des découragements ou des tiédeurs qui nous menacent.
La foi est une victoire quotidienne sur le doute, le péché, le découragement, et pour cela elle est un combat. Qu’en est-il pour moi ?
Alléluia. Alléluia. Thomas, pare que tu m'as vu, tu crois, dit le Seigneur. Heureux ceux qui croient sans avoir vu ! Alléluia.
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 20, 19-31
Les doutes de l’apôtre Thomas deviennent pour lui un chemin de foi. En est-il de même pour nous ?
C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie ». Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus ».
Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »
Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! » Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant ». Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu ».
Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom. - Acclamons la Parole de Dieu.
Commentaire : Dans l'Évangile, tantôt Jésus marche devant pour montrer le chemin, tantôt il reste en arrière et invite ses disciples à préparer l'étape suivante. Parfois, il lui arrive de se mêler à la foule compacte de la ville ou bien de se retirer dans la solitude de la nuit, sans prévenir. Jésus n'est pas toujours là où on l'attend. C'est vrai de tout accompagnement respectueux. Tantôt indiquer le chemin, tantôt se faire discret et faire confiance. Sa mort a mis un terme à sa proximité, dans la parole comme dans le silence. Son absence fait mal, sa disparition fait peur. Au soir du premier jour de la semaine, Jésus se présente au milieu de ses disciples. Malgré les portes verrouillées, sa présence s'impose. Non comme un coup de tonnerre, mais comme une paix. Sa voix est douce comme la brise légère. Ce soir-là est le premier de la semaine, il inaugure un commencement. Il y eut un deuxième soir, et Thomas était là, pour que d'autres, que l'on n'attendait pas, entrent à leur tour dans la joie de croire.
Père Arnaud Favart
Homélie
L’Évangile de ce 2ème dimanche de Pâques nous relate l’apparition de Jésus Ressuscité au collège des Apôtres réunis au Cénacle.
Il ne s’agit donc pas d’une révélation privée, mais d’une révélation officielle faite aux responsables de l’Église naissante.
Ils sont tous là, y compris Thomas, le plus sceptique et le plus exigeant, son raisonnement est le suivant : Je ne veux pas seulement voir Jésus, car mes yeux pourraient êtres victimes d’une hallucination. Non, je veux mettre mon doigt à l’endroit des clous. Je veux mettre ma main dans son côté « j’ai besoin d’une démonstration expérimentale ».
Jésus (qui l’a tout de même fait patienter huit jours), se livre de bon cœur à l’expérience.
La transformation des Apôtres est alors totale : ils passent de la terreur à la joie. Quant à Thomas il passe du doute méthodique à la foi. En relisant l’Évangile nous réalisons combien nous pouvons êtres reconnaissants aux Apôtres d’avoir été d’abord des sceptiques avant de devenir des croyants convaincus. Ils ont douté et ils ont vu, pour qu’aujourd’hui nous puissions croire sans voir.
Car la foi, il faut l’affirmer haut et fort, ne va pas de soi. Admettre le mystère de l’Incarnation, la présence de Jésus dans l’Eucharistie, la virginité de Marie, le péché originel et toute autre vérité dogmatique ce n’est pas évident. Pourquoi avons-nous des doutes qui empoisonnent notre vie spirituelle ? C’est parce qu’à l’exemple de Thomas nous sommes des visuels.
Combien déclarent « Je ne crois qu’à ce que je vois. Ah ! Si la Sainte Vierge m’apparaissait, si je voyais un miracle, je croirais volontiers. »
Il est à parier que les mêmes devant de tels phénomènes trouveraient une explication scientifique…
Oui, nous voulons toucher le Seigneur, nous sommes modernes nous avons le droit et le devoir de tout vérifier scientifiquement. Or, les hommes du 21ème siècle qui se piquent d’êtres scientifiques se précipitent tête baissée dans les horoscopes, l’occultisme, le paranormal et que sais-je ? Autant de croyances qui n’offrent aucune certitude…
Le mal ne viendrait-il pas de ce qu’en fait nous sommes trop ignorants de notre religion ? Nous ne connaissons les splendeurs de la foi qu’à travers les bribes d’un catéchisme mal assimilé et en grande partie oublié.
Que répondrions-nous dites-moi, si l’on nous demandait d’écrire rapidement sur un papier notre définition de la messe, de l’Esprit-Saint, de l’Eglise ou du sacrement de mariage.
Dans ces conditions il ne faut s’étonner que les médias déstabilisent les croyants lorsqu’ils présentent les enseignements du Pape ou des évêques d’une façon caricaturale, rudimentaire et parfois même ridicule.
Il faut bien le reconnaître hélas ! Beaucoup parmi les chrétiens ne sont pas des hommes de peu de foi, mais d’une pauvre foi :
- pour certains c’est une foi self service, ils piochent dans les vérités révélées, celles qui les arrangent, se fabricant ainsi un petit christianisme sur mesure… on a sa petite religion à soi.
- pour d’autres c’est une foi genre fétichiste laquelle exige que Dieu soit à leur service.
- pour d’autres encore c’est une foi qui saute de grandes fêtes en grandes fêtes au dessus d’un grand vide spirituel, une foi qui n’a pas de répercussions sur la vie…
Ce que nous devons bien comprendre, chers frères et sœurs, c’est que la foi n’est pas de l’ordre de la certitude scientifique…
La foi est une confiance éperdue accordée à la Parole de Dieu, la certitude que Dieu s’adresse à nous à travers les pages sublimes de la Bible et de l’Evangile et tant de messages d’amour qui nous parviennent à travers la Création, les personnes ou les évènements.
Mais il importe pour cela que nous soyons affamés de vérité et à l’écoute permanente de ce poste émetteur qu’est Dieu à l’image de ces radars géants qui écoutent des signaux venant de planètes lointaines…
La foi est une connaissance par signes que nous devons décoder.
Cependant la foi qui suppose certaines dispositions de recherche et d’accueil de la part de l’homme suppose également une grâce du Seigneur en ce sens que Dieu met des signes sur notre chemin et qu’il a la bonté de les éclairer par ce projecteur de Lumière divine qu’est l’Esprit-Saint.
C’est la raison pour laquelle nous devons demander dans notre prière ce don de Dieu qu’est la foi et le demander instamment : « Tu as de la chance de croire dit-on parfois au croyant : moi je n’ai pas la foi. » La réponse est simple : « Qu’attends-tu pour la demander ? »
« On n’a pas besoin d’avoir la foi pour prier, disait François Mauriac. Il faut prier pour avoir la foi. »
Et alors l’étonnement se réalise : le croyant qui n’est pas un voyant finit pourtant par devenir plus qu’un voyant parce que bien des pans du monde invisible sortent soudain de l’ombre pour lui. C’est le cas de Thomas : il fait plus que voir le Christ. Il croit et découvre alors beaucoup plus de choses que ne le perçoivent ses yeux de chair. Il ne dit pas simplement : Oui Jésus, tu es vivant, j’en ai la preuve. Il tombe à genoux et s’écrie : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » C’est à dire : « Ta résurrection est le signe que tu es Dieu ». A cette minute il est bien plus qu’un voyant.
Il est un croyant qui perçoit clairement l’invisible, qui perçoit la Divinité de Jésus.
L’immense joie éprouvée par tout converti qui découvre la foi est de voir soudain le monde autrement. Il découvre, ébloui, la face cachée du monde. Tout prend un sens nouveau. Toute la création transpire la présence de Dieu : chaque rose, chaque brin d’herbe, chaque insecte, chaque goutte de pluie, chaque cœur aimant…
« Après 87 ans d’observations et de réflexions disait le grand spécialiste du monde des insectes Henri Fabre, je ne peux pas dire que je crois en Dieu. Je le vois. »
Nous voulons voir Dieu, alors ouvrons les yeux : il nous attend partout.
En ce temps de Pâques nous prierons avec ferveur Marie notre éducatrice spirituelle, qui fut la première à croire avant de voir de nous communiquer sa foi enthousiaste en Jésus Ressuscité.
Amen.